vendredi 19 avril 2013

Immersion ratée

À peine entrée, je me sens étrangement trop couverte pour la circonstance. Avec cette robe plissée m'arrivant aux genoux, je prétends ressembler à Bettie Page...





Mais, en voyant ces chairs offertes aux regards, ces rondeurs suggestives, j'ai l'impression d'être un réglisse dans une boîte de chocolats de Noël. Je n'ai rien à foutre là.  Ma vanité croyait reproduire un charme rétro mystérieux et chic; à présent, elle souffre de ne pas ressembler à toutes ces femmes apprêtées. Et tout ça pour quoi? Capter l'attention des têtes chercheuses qui peuplent le lieu. Accepter le statut d'objet qui accompagne cette gratification douteuse.

Néanmoins, je refuse de boire cet alcool onéreux et peu goûteux pour éponger mon malaise. J'avale donc un jus d'orange bon marché coupé à l'eau (à part récupérer l'eau de vaisselle, je ne vois pas comment faire plus d'économie sur le dos du client). Je compte sur la musique pour m'amuser, c'est pour ça que je suis là, je crois. Évidemment, la déréliction ne vient pas. Je m'efforce de danser "en rythme" comme on dit. Sans succès. J'échange sur la nullité du DJ.





Ma conversation est la quintessence de la banalité. Je m'en aperçois avant même de parler, mais je suis au désespoir: il faut bien faire passer le temps qui s'étire et s'allonge comme la bite de ce type qui bave devant chaque jambe qui passe.

Je suis sur le point d'accepter la cigarette qu'on me propose, juste pour m'occuper les mains, m'inventer une contenance. Mais, sursaut de fierté, je me reprends et j'endure. Je retourne à l'intérieur, passage aux toilettes avec une amie éméchée (en tout cas, à en croire ses nombreux "j'suis complètement pétée!"). Les coulisses ne sont pas beaux à voir. L'odeur est insoutenable, une fille sanglote. Puis, une porte grande ouverte laisse voir une personne assise sur la cuvette: la pudeur s'est enfuie en courant.







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